« La » CIRCULAIRE DSS SUR LES CONTRATS RESPONSABLES :
« LAST BUT NOT LEAST » !
« La dernière mais non la moindre », en français dans le texte, et après la LFSS 2014 et le décret du 18 novembre 2014, il n’est pas peu dire que la circulaire de la Direction de la Sécurité Sociale du 30 janvier 2015, publiée le 6 février dernier, était attendue par les professionnels des assurances de personnes et plus spécialement des collectives de salariés.
L’administration livre sa lecture des nouvelles conditions des « contrats responsables ». Foin de multiples projets, on peut donc désormais se sustenter avec la doctrine officielle ! Reste à savoir si tout à chacun considérera cette vision du droit positif comme suffisamment claire et définitive ou si elle suscitera de nouvelles questions, l’expérience démontrant que certaines « circulaires interprétatives » ont pu, par le passé, générer le débat sur la façon dont il fallait… les interpréter !
On le sait, la position de l’administration est attendue principalement sur deux points : d’une part, la possibilité de recourir à une opération surcomplémentaire de frais santé aboutissant à obtenir des remboursements cumulés dépassant les plafonds de couverture, toutes assurances confondues, et d’autre part, l’application dans le temps de ces nouvelles conditions.
Sur le premier point, la DSS considère qu’un « contrat avec des options est un contrat unique ». Voilà qui est tranché, et il faut donc acter que le recours à des options au sein d’un contrat, fussent-elles sollicitées et financées par le seul salarié, aboutissent, pour l’administration, à déqualifier le contrat d’assurance dans son ensemble.
En revanche, la position est nettement plus nuancée s’agissant d’un contrat d’assurance surcomplémentaire souscrit par l’employeur, complétant ce que la DSS qualifie de « contrat socle ». On invitera ceux qui n’ont pas encore eu le plaisir de se lancer dans la lecture de la circulaire (ou qui ne le souhaitent pas !) à prendre connaissance d’un tableau de synthèse porté en page 11, qui traite sept combinaisons. Le cas n°6 est peut-être le plus intéressant en ce qu’il évoque l’hypothèse d’un « contrat socle » respectant toutes les conditions des contrats responsables et d’un « contrat surcomplémentaire » dont les garanties associées à celles du premier dépassent les plafonds de couverture. Dans ce cas, le « contrat socle » est considéré comme responsable et non le second. En d’autres termes, « l’irresponsabilité » du deuxième étage ne pollue pas le premier.
Il en ressort que le recours à une « surcomplémentaire » ne passera pas nécessairement par l’acquisition par le salarié d’une assurance strictement individuelle. L’employeur peut donc décider d’intervenir, le cas échéant en « découpant » son régime existant en deux contrats, quitte à réadapter son effort contributif en ne le portant que sur le « premier étage » par une modification des répartitions « employeur/salariés » laissant à ces derniers la prise en charge totale de la surcomplémentaire. Bien évidemment, cette approche suppose d’accepter de souscrire un second étage non responsable, dont la prime sera soumise à la taxe de solidarité additionnelle de 20,27 % (et non de 13,27 %) et, pour le salarié, de supporter un financement de cette seconde couverture non déductible fiscalement.
Concernant l’application dans le temps, rappelons que la loi prévoit que les nouvelles conditions s’appliquent aux contrats souscrits ou renouvelés « à compter du 1er avril 2015 », ce qui aboutit à appliquer les nouvelles conditions, dans la plupart des cas, au 1er janvier 2016, pour les contrats collectifs dont la première échéance de renouvellement se situe à cette date. La loi prévoit également une « période transitoire », la « fameuse » période transitoire serait-on tenté de dire, qui concerne les dispositifs collectifs de salariés dont l’acte de formalisation a été institué avant le 9 août 2014, permettant aux dispositifs non conformes aux nouvelles règles de rester en l’état, jusqu’à leur prochaine modification et au plus tard au 1er janvier 2018, en conservant les avantages fiscaux et sociaux pendant ce laps de temps.
Tout d’abord, la DSS considère que les modifications de l’acte de formalisation intervenue avant le 19 novembre 2014 (date de parution du décret d’application) ne fait pas sortir l’entreprise concernée de la période transitoire. En revanche, les modifications ultérieures font sortir l’entreprise de cette période, ce qui suppose alors de déterminer à quelle date l’entreprise bascule dans les nouvelles conditions. Sans faire déshonneur aux rédacteurs de la doctrine étudiée, admettons qu’elle n’est pas, sur ce point, d’une clarté absolue. On comprend que pour les actes de formalisation modifiés après le 19 novembre 2014, la circulaire opère une distinction selon que le contrat d’assurance intègre ces modifications :
• avant le 1er avril 2015, auquel cas les nouvelles conditions doivent être mises en œuvre au prochain renouvellement (ie le 1er janvier 2016),
• ou à compter du 1er avril 2015, auquel cas la DSS considère que les nouvelles conditions doivent être mises en œuvre, dès la date d’effet de l’avenant au contrat d’assurance.
On relèvera également que l’adaptation du régime d’entreprise « post 19 novembre 2014 » à un accord de branche professionnelle modifié « ante 19 novembre 2014 » n’est pas assimilée à un cas de sortie de la période transitoire.
Tout cela n’est guère simple et on imagine que les inspecteurs des URSSAF doivent peut-être soupirer à l’idée de devoir contrôler, dans les prochaines années, ces nouvelles conditions. Sans chercher à les plaindre, relevons que la circulaire se conclut par un appel à la bienveillance, la DSS invitant les chargés du recouvrement « à prendre en compte, pour les contrôles opérés au titre des années 2015 à 2017, les contraintes juridiques et techniques auxquelles le souscripteur ou adhérent et l’organisme de protection sociale complémentaire pourraient avoir été confrontés ainsi que les diligences effectuées pour mettre en conformité leurs garanties ».
Une sorte d’appel à la « responsabilité » des inspecteurs ?
Maître Frank Wismer Cabinet BRIENS QUATREM De l’information à l’action