LA PORTABILITÉ ET LE MAINTIEN DES GARANTIES EN CAS DE LIQUIDATION JUDICIAIRE.
En l’espèce, une société a souscrit un contrat collectif santé et prévoyance auprès d’une institution de prévoyance au profit de ses salariés. Le 16 février 2016, le tribunal a ouvert la liquidation judiciaire de l’entreprise et a nommé un liquidateur à cet effet. Ce dernier a procédé au licenciement de l’ensemble des salariés.
Postérieurement aux licenciements des salariés concernés, l’institution de prévoyance a résilié le contrat d’assurance à effet du 29 février 2016, sur le fondement de l’ancien article L.932-10 du Code de la Sécurité sociale.
Le 18 mars suivant, le liquidateur a versé une somme de 35 120,18 euros à l’institution de prévoyance afin que les garanties santé et prévoyance soient maintenues postérieurement à la résiliation du contrat d’assurance.
Estimant ensuite que la somme versée n’était pas due, le liquidateur assigne l’institution de prévoyance en demande de remboursement.
La Cour d’appel déboute le liquidateur de ses demandes, considérant que :
- les garanties ne sont plus en vigueur dans l’entreprise à compter de la résiliation du contrat d’assurance ;
- le paiement du liquidateur à l’institution de prévoyance ne peut être considéré comme de l’indu, car ce financement a été librement consenti pour assurer les anciens salariés licenciés en 2015.
Le liquidateur forme alors un pourvoi en cassation.
La Cour de Cassation rejette le pourvoi considérant que :
- la portabilité de l’assurance est due même en cas de liquidation judiciaire de l’employeur, sans que soit exigée l’existence d’un dispositif assurant le financement du maintien de couverture ;
- le maintien des droits implique toutefois que le contrat liant l’employeur à l’institution de prévoyance ne soit pas résilié ;
- la résiliation légitimement notifiée en application de l’ancien article L932-10 du Code de la Sécurité sociale, a entraîné la fin de l’application des garanties dans l’entreprise ;
- le paiement par le liquidateur des cotisations dues au-delà du 29 février 2016 (résiliation) ne peut être considéré comme indu car ce financement a été librement choisi pour assurer les anciens salariés licenciés fin 2015.
Pour rappel l’article L.932-10 du code de la Sécurité sociale, dans sa version antérieure au 6 mai 2017, permettait aux institutions de prévoyance de conserver une faculté de résiliation contractuelle pendant un délai de trois mois à compter de la date du jugement de sauvegarde ou de redressement ou de liquidation judiciaires.
Depuis la modification de l’article L932-10 du code de la Sécurité sociale par ordonnance n°2017-734 du 4 mai 2017, cette faculté de résiliation dérogatoire a été supprimée.
Seules les dispositions actuelles du code de commerce (L641-11-1 C. Com.) pouvant s’appliquer, elles interdisent donc de résilier les contrats du seul fait de la liquidation judiciaire et doivent permettre au mandataire judiciaire de se prononcer sur la poursuite – ou non – des contrats, moyennant paiement des cotisations contractuellement prévues.
L’assureur conserve ainsi sa faculté de résiliation en cas de défaut de paiement des cotisations postérieures à la liquidation.
Bien que rendu sous l’empire de l’ancien article L932-10 du code de la Sécurité sociale, ce nouvel arrêt rendu par la Cour de Cassation apparaît s’inscrire dans la lignée des cinq avis de la Cour rendus le 6 novembre 2017 selon lesquels, « le maintien des droits implique que le contrat ou l’adhésion liant l’employeur à l’organisme assureur ne soit pas résilié » (Cass., avis, 6 novembre 2017, n° 17013 à n° 17017).
Les garanties maintenues au titre de la portabilité étant « celles en vigueur dans l’entreprise » (article L.911-8 3° CSS), la Cour de Cassation a pu logiquement en déduire que la portabilité dont bénéficient les anciens salariés devait cesser avec la résiliation du contrat collectif.
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